D’une famille à l’autre – Anna Muylaert

106256.jpg-r_1920_1080-f_jpg-q_x-xxyxxFelipe profite de sa fin d’adolescence dans les fêtes branchées de São Paulo. Sa mère, qui l’élève seule avec sa jeune soeur, lui laisse une grande liberté. Sauf que leur mère n’est pas leur mère: un test ADN prouve qu’elle les a enlevés à la naissance. Séparés, les enfants sont précipités dans leur vraie famille. Les parents biologiques de Felipe, à sa recherche depuis 17 ans, se retrouvent face à un adolescent qui ne partage pas tout à fait leur conception de la vie…

Avec un sujet très fort, ce film brésilien déçoit. D’une famille à l’autre est bien trop court, 1h22, avec une fin abrupte. Avec un personnage principal Pierre/Felipe très peu attachant, on a du mal à être ému par lui, il a un visage peu avenant, souvent boudeur. Le seul moment d’émotion réussi a eu lieu lorsque sa petite sœur est emportée sans ménagement par ses parents biologiques.

Cette incroyable histoire de famille aurait du faire un grand film, cette séparation brutale, une nouvelle famille, des nouveaux repères, nouvelle école, un nouveau frère, des parents plus aisés. Tout était là normalement pour que la mayonnaise prenne, mais le choix de l’acteur principal et certaines pistes du scénario compliquent la tâche. Pierre/Felipe est dés le début mal dans sa peau, dans un groupe de rock, oncles vernis de couleur foncé, travestissement. Bisexuel et mal dans sa peau, normal en même temps pour un garçon à qui on a menti sur ses origines. Ce détail du scénario prend son sens mais il est bien trop poussé, trop présent selon moi. Dans un film relativement court, on ne peut pas perdre plusieurs minutes à refaire la même scène de travestissement dans la salle de bains, Pierre/Felipe qui se maquille, se rase le torse, prend des poses érotiques.

 Cet aspect très intime, dans la salle de bains, aurait pu à mon avis servir différemment dans la deuxième partie du film. Comme si le scénario n’allait pas au bout de ses idées. Au final, lors d’une séance d’habillage dans un magasin de vêtements, ce coté travesti va ressurgir violemment, Pierre/Felipe sortira du placard (ou plutôt de la cabine d’essayage) devant les yeux ébahis de ses parents habillés en robe.

 Face à l’homophobie du père, Pierre/Felipe continuera de le provoquer, ne se sentant pas à sa place dans cette nouvelle famille. Eux, les parents, craignant de perdre à nouveau le fils en ne tolérant pas ses attitudes, ils acceptent à contre coeur de le voir s’habiller en fille, à la maison, comme dehors. J’aurais aimé que la relation que l’on voit germer à la toute fin du film avec le petit frère ait une suite, qu’ils partent à la recherche de la petite soeur, qu’ils essaient de recréer leur famille. Bref, pleins d’idées germaient dans mon esprit à la fin. Le film me laisse avec un goût inachevé, il n’y a pas assez d’espoir, tout est très sombre, glauque. C’est un film très court sur une tranche de vie, alors qu’on aurait pu avoir envie d’une grande épopée.